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The Company Men : crise économique et fierté masculine

Pour son premier film, John Wells réalise avec The Company Men une très belle satire sociale, flanquée d'une belle et talentueuse distribution.




Bobby Walker est l’incarnation même du rêve américain : il a un très bon job, une merveilleuse famille, et une Porsche toute neuve dans son garage. Mais lorsque la société qui l’emploie réduit ses effectifs, Bobby se retrouve au chômage, tout comme ses collègues Phil Woodward et Gene McClary. Les trois hommes sont alors confrontés à une profonde remise en cause de leur vie d’hommes, de maris et de pères de famille.
Bien loin de ses talents de cadre supérieur, Bobby se retrouve obligé d’accepter un emploi dans le bâtiment pour le compte de son beau-frère. Cette expérience va le pousser à découvrir qu’il y a peut-être plus important dans l’existence que de courir après la réussite…


Producteur vétéran de séries TV à succès comme Urgences et À la maison blanche John Wells se retrouve à 55 ans pour son premier film au cinéma. Le projet est resté foncièrement le même, puisqu'il ne date pas d'hier. En effet, il a écrit le scénario après la récession économique du début des années 90 alors qu'il avait en projet de monter le film, il y a environ déjà dix-sept ans. A l'époque où Oliver Stone avait déjà dézingué l'économie américaine avec Wall Street, John Wells reprend son projet en 2008 suite à la récession qui mis à feu et à sang plusieurs économies mondiales. Après la mise en place d'un site web où des internautes racontaient leurs licenciements et le quotidien depuis, Wells s'est mis en tête de faire ce film. Sans tomber dans le pathos dans lequel le film pourrait tomber, John Wells porte un film avec un regard critique étonnant, entre confrontations réalistes et ton sans concession. Il évoque la crise économique avec un recul intéressant, sans jugement de valeur ni d'idée reçue, juste un point de vue externe mûrement réfléchis, qui ne change pas tant que ça entre les décennies. Du licenciement abusif bien-pensant parce que l'on croit que ce sera la solution miracle aux problèmes des investisseurs, au patron de la boîte en question qui fait partie des plus grandes fortunes du pays, The Company Men ne se prive pas d'égratigner le gratin de l'économie américaine avec un pointe d'esthétisme qui ne nous fait pas regretter le ton sarcastique de Michael Moore. On est loin du blockbuster ou du thriller dramatique à en faire baver les ménagères, puisque The Company Men s'avère être un film beaucoup plus profond, doté d'une réflexion sur la société intéressante, et qui devient percutant lorsqu'il s'immisce dans ce qui semble être la réalité d'une entreprise, dans des réunions qui discutent et planifient des solutions pour redresser l'entreprise. Volontaire et parfois impertinent, The Company Men gagne en crédibilité malgré quelques longueurs et un côté prévisible un poil décevant.





The Company Men ne serait probablement grand chose sans son casting de choc, cinq étoiles minimum, et qui prouve par ailleurs que ses acteurs sont loin d'être out. Ben Affleck, qui continue à faire les bons choix de carrière, entre Will Hunting et Jeux de Pouvoir, en passant par Pearl Harbor. Il incarne un père de famille jeune et ambitieux, typique de l'Américain fier et homme de maison, qui tente d'affronter du mieux qu'il peut son licenciement. Il doit incarner au mieux le dicton moraliste du film qui affirme qu'avec de la foi, du courage et de l'enthousiasme, on peut arriver à surmonter tous ses soucis. Hasard des choses, il se retrouve comme un symbole à donner la réplique à un toujours énorme Tommy Lee Jones, charismatique à souhait, émouvant et homme attachant en même temps, et pour qui ses silences et ses répliques font partie des meilleurs moments du film. Il se retrouve dans la peau d'un Gene McClary viré de la boîte qu'il a fondé avec James Salinger l'actuel patron (Craig T. Nelson), son propre ami. Le troisième pion de ce film est bien moins mis en valeur. Phil Woodward (Chris Cooper) se retrouve lui aussi sur le palier de GTX, société qui l'a vu gravir les échelons, pour finalement être jeter comme une chaussette salle, sans aucune humanité. Le trio évolue avec beaucoup de réalisme et de talents, restant à l'image d'un film qui veut rester sobre et critique, sans tomber dans les atermoiements et larmoyant de ce genre de film. Sans compter les présences de Maria Bello et Kevin Costner, on a du mal à croire à une critique de l'économie US avec un tel gratin de stars. Pour finir, The Company Men retombe sur son côté prévisible, dans un final utopique qui croit au capitalisme refondé, retrouvant les valeurs idéalistes (le travail, l'austérité, le courage) de l'Amérique protestante, avec un air de positivisme assumé. Difficile d'y croire.



Étrangement critique et sombre en apparence par le traitement de son sujet, The Company Men arrive à être un film étonnamment positif, véritable et touchant quand il le faut, porté par d'excellents acteurs.


NOTE : 14 / 20



03/04/2011
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