Cine-emotions

Carancho, chronique des obscures nuits argentines.

Après le milieu carcéral en 2008 dans Leonera, Pablo Trapero offre un constat  de la corruption et de la fraude aux assurances en Argentine, un film saisissant dans lequel un couple d'anti-héros tente de survivre.





Sosa, un avocat spécialisé dans les accidents de la route à Buenos Aires, rode la nuit tel un 'Carancho' à la recherche de clients dont il pourra tirer profit grâce à la fraude aux assurances et à la corruption. Une nuit, il rencontre Lujan, une jeune urgentiste. Dans ce monde corrompu qui ne laisse guère place à l'optimisme nait leur histoire d'amour.



Présenté à Cannes en 2010 dans la sélection "Un certain regard", Carancho est un film à la limite du documentaire sur ces maux qui frappent l'Argentine. On y découvre Buenos Aires la nuit et la dangerosité des routes à cause des accidents de circulation, l'une des causes principales de décès par accident dans ce pays. Les travers de la société et ses dysfonctionnements se révèlent ainsi devant la caméra du cinéaste engagé qui donne à voir cette réalité sociale.


Pablo Trapero montre l'impact de ces accidents sur différents personnages. D'un côté, on découvre la corruption et les avocats, ces 'caranchos' (charognards) sans scrupules qui profitent des victimes d'accidents, organisent des fraudes à l'assurance. C'est tout un réseau qui se dévoile à travers Sosa. Néanmoins, le personnage de cet avocat est assez nuancé, puisqu'il subit plutôt cette situation en attendant de récupérer le droit d'exercer. Fatigué et lassé, il souhaite quitter Buenos Aires mais sa rencontre avec la jeune urgentiste va tout changer. De l'autre côté, Lujan nous emmène dans son quotidien, celui des médecins et ambulanciers de nuits, débordés, qui enchainent les patients dans les mêmes blocs opératoires d'hôpitaux peu reluisants. Épuisée, la jeune femme se drogue pour tenir le coup.




Ces deux personnages sont amenés à se rencontrer lors d'un accident. C'est alors le début d'une histoire d'amour touchante. Ils se découvrent tous deux plongés dans une spirale destructrice : à cause du réseau de fraudes pour Sosa et de la drogue pour Lujan. Aucun n'est parfait mais leur passion amoureuse va les entrainer dans les travers de l'autre. Ces deux anti-héros, interprétés avec justesse par Ricardo Darin (Dans ses yeux) et Martina Gusman (Leonera), tentent de survivre et de préserver leur histoire dans cet univers sombre et violent, sans aucun optimisme.



L'atmosphère est lourde, assommante. La quasi-totalité du film, exceptée la fin, se déroule la nuit ou dans des locaux obscurs à la lumière de néons, créant ainsi une atmosphère chargée. Ce sentiment est renforcé par les deux personnages principaux, qui traversent ces lieux le visage fermé, fatigué, excepté lors de rares moments de complicité amoureuse. Si l'on peut reprocher au film d'être plutôt prévisible, on ne peut nier que le final reste marquant tant il est parfaitement maitrisé, dans un plan séquence où la tension est au plus haut.



Loin de la sortie de route, Pablo Trapero vise juste dans sa vision de ce fait social argentin, montrant ainsi la dure réalité des nuits argentines où les vautours rodent. Il offre un film assez bien rythmé et bien dosé puisque Carancho oscille habilement entre le thriller et la romance, avec au centre un duo d'acteurs convaincants.


NOTE : 14 / 20





07/02/2011
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