Cine-emotions

Les Herbes Folles, d'Alain Resnais.

Quatre-vingt sept printemps, Alain Resnais est encore derrière la caméra pour un nouveau long-métrage, Les Herbes Folles, ayant pour thème le hasard et l'amour.

 

Marguerite Muir est chirurgien dentiste, doté de pieds particuliers qui la force à prendre des chaussures particulières. En sortant de son magasin de chaussures favori, elle se fait voler son sac. Rien n'aurait alors prédit que derrière, ce voleur aurait laissé tomber le portefeuille dans un parking de centre commercial, mais surtout qu'un certain Georges Palet aurait ramassé derrière. Et avec cet événement anodin, il peut s'en passer des choses…

 

Jouer de la métaphore de l'herbe, ou plutôt ici l'herbe folle. Car cette notion prend tout son sens, et on comprend alors ce jeu si simple offert par Alain Resnais. Une caméra qui se fixe sur des touffes d'herbes coincées dans le béton, puis des herbes hautes battues par le vent, et enfin une forêt de jambes, sorte d'amalgame avec les herbes justement. L'homme est une herbe, sa vie est faite et constituée d'herbe. Et on ne se trompe pas lorsque le réalisateur nous dit : « Nous sommes tous des herbes folles, poussées entre les pavés gris de la ville ». Mais plus encore, Les Herbes Folles, c'est pour ces deux personnages, ils n'ont aucune raison d'entretenir une liaison ou de se parler. C'est aussi improbable que de trouver des herbes coincées entre plusieurs pavés d'une ville !

 

Un casting haut en couleur pour Alain Resnais, porté par un excellent André Dussollier, à la fois sombre et drôle, à l'image du film. Il va former avec Sabine Azéma et sa coupe dithyrambique, un duo très improbable. On retrouve aussi Sara Forestier, Nicolas Duvauchelle, Mathieu Amalric ou encore Annie Cordy en guest-star, et enfin le charme d'Emmanuelle Devos ou Anne de Consigny. Le film est porté par une très belle bande-son qui amplifie le jeu de caméra, l'ambiance du film. Elle est signée par un certain Mark Snow, aussi créateur du générique de X-Files. Avec ses différents jeux, il offre à la fois de l'humour, de l'émotion, et une histoire tout aussi attachante, avec une pointe d'originalité et de classique (l'exemple du « fin » pour clore l'histoire).

 

 

Il est difficile d'aller blâmer un tel cinéaste, l'un des rois de la Nouvelle Vague, celui qui avait commencé à la réalisation en 1946 par La Bague, auteur de films comme Hiroshima mon Amour (1959), Je t'aime, Je t'aime (1968), I Want to Go Home (1989), On Connaît la Chanson (1997), Pas sur la Bouche (2003). On peut éventuellement viser les répétitions et ses lourdeurs incessantes à vouloir répéter les choses comme s'il fallait boucher les trous (ou alors les écarts entre les pavés à défaut d'y trouver de l'herbe). Mais même pas, car on va directement penser qu'il fait ça pour se détacher, car son cinéma n'est pas comme celui d'un réalisateur qui s'amuserait à raconte l'amour d'une façon trop simpliste, sans originalité.

 

Les Herbes Folles est au départ une adaptation d'un roman de Christian Gailly, L'incident. A la vue de la bande annonce, on ne sent pas le grand film venir, on se demande même où l'intérêt d'aller le voir. S'il semblerait se destiner à un public connaisseur, amateur d'un cinéma à la Alain Resnais, ces fans de la Nouvelle Vague ou du cinéma d'amour à l'ancienne, on ne se trompe pas : ce genre de films qui font du bien à voir, car il sorte de la dimension purement commerciale, trop simple, caricatural, à la limite hollywoodienne. C'est ce cinéma unique qui manque tellement au cinéma français (entre autre). Et clin d'œil au destin, comme la boucle était bouclée, l'image de ces herbes folles, non sans rappeler ce travelling sur les rails d'Auschwitz, dans le film qui l'a rendu si célèbre, Nuit et Brouillard, en 1955.

 

Alain Resnais, récompensé par un Prix Exceptionnel à Cannes pour l'ensemble de sa carrière, a encore une nouvelle fois touché par Les Herbes Folles, un film sur le hasard et l'amour, entre humour et émotion, met une nouvelle fois en lumière ce cinéma si bon qu'est celui d'Alain Resnais.

 

NOTE : 14,5/20

 



15/11/2009
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