Cine-emotions

Chicas s'annonce en film d'auteur, coincé entre la comédie et le drame familial. Pour son premier film, Yasmina Reza va peut-être devoir revoir sa copie.

Pilar est espagnole et veuve. Elle a élevé ses trois filles en France. Amoureuse de Fernand, le gérant de son immeuble, elle organise chez elle un déjeuner de présentation. Une réunion improbable où la folie familiale l'emporte.

Quand on lit l'histoire, on s'attend à quelque chose d'explosif, qui n'a absolument rien à avoir avec la lenteur de cette bande annonce. En vérité, la bande annonce est plus criante de vérité sur le premier film de Yasmina Reza, qui sort de son monde théâtral pour se lancer dans la réalisation après de multiples sollicitations. Le noyau de cette histoire vient d'une pièce signée Olmo Panero, qui avait enthousiasmé la future réalisatrice lors d'un passage à New York. Après le synopsis de base, Yasmine Reza adapte sa vision de l'histoire. Elle s'entoure de l'ancienne égérie de Pedro Almodovar, la grande Carmen Maura, sans qui le film n'aurait absolument aucun intérêt.

On retrouve également André Dussollier, plus convaincant avec l'humour et la sensibilité d'Alain Resnais (Les Herbes Folles) plutôt que chez Yasmine Reza où il semble s'ennuyer ferme, et où il n'arrive jamais à tirer son épingle du jeu. Emmanuelle Seigner se retrouve en fausse star (ce qui laisse espérer) sans réellement convaincre (elle est bien mieux avec son mari Roman Polanski dans Frantic ou La Neuvième Porte). Enfin Valérie Dréville s'impose en sœur et fille impitoyable, mais son personnage semble aussi ennuyeux.

On finit par se demander si Yasmina Reza ne voulait pas elle aussi filmer la solitude de chacun de ses personnages. Avec ses longueurs et ses scènes qui n'ajoutent pas de piment au film, si ce n'est qu'elle comble les vides, Chicas aurait du s'annoncer comme quelque chose de plus vibrant. Quelques passages offrent au spectateur des moments intéressants, notamment lorsque les personnages vont enfin chercher les émotions au fond d'eux-mêmes. Enfin, la réalisatrice force presque son spectateur à se placer entre cette mère difficile à vivre, mais qui essaye de se reconstruire comme elle le peut, et les filles aux destins si différents, mais toutes aussi invivables.

Chicas est une première réalisation moyenne pour Yasmina Reza qui montre tout de même un potentiel. Avec un peu plus de rythme et d'intérêts, Chicas aurait très bien pu se voir taxer de bon film mélo, mais il n'en est rien ou presque. Décevant.

NOTE : 9.5 / 20