Le Rite : l'exorcisme pour les Nuls
Après Le Dernier Exorcisme, Le Rite postule à nous montrer la vérité sur ces pratiques de luttes contre le démoniaque à partir de faits réels. Aussi efficace ?
Le jeune séminariste américain Michael Kovak se rend au Vatican pour y étudier les rites de l’exorcisme. Féru de psychologie, il nourrit de sérieux doutes à l’égard de ces pratiques anciennes, et juge que la «possession» relève de la psychiatrie plutôt que de la démonologie. Il se heurte périodiquement à ses formateurs jusqu’au jour où ceux-ci l’adressent au Père Lucas, ecclésiastique légendaire qui a pratiqué avec succès des centaines d’exorcismes. Au contact de ce mentor au comportement abrupt et déroutant, Michael commence à se déprendre de ses préjugés. Un cas se présente bientôt à lui, dont la violence terrifiante va le forcer à se remettre en question…
« Le combat contre le Démon,
qui fut la mission première de l'Archange Sant Michel, reste
d'actualité, car le Diable est encore en vie, et à l'œuvre, dans
notre monde ». En commençant par la sainte parole
prémonitoire et néanmoins flippante de Jean-Paul II, figure moderne
emblématique et désormais historique du Vatican, Le Rite
voudrait bien se donner une once de crédibilité non négligeable.
La deuxième veut que l'histoire soit bien réelle, transposer ici en
fiction mais avec un brin de réalisme accrocheur. Le projet commence
donc en 2007 lorsqu'un journaliste (Matt Baglio) basé à Rome,
décide de se pencher sur la question de l'exorcisme et de ses
pratiques, alors que le Vatican vient de décider d'installer un
exorciste dans chaque diocèse, suite à une recrudescence des cas
supposés de possession. Baglio va donc écrire un livre après avoir
découvert une école d'initiation à l'exorcisme où il fait la
rencontre d'un prête américain qui va le confronter à la réalité
de ces pratiques que tentera de décrire le journaliste, et c'est ce
qui va inspirer le film. Ce dernier part donc d'une base réelle et
documentée pour essayer d'en tirer l'essence de ce phénomène qui
reste un mystère pour le spectateur de l'extérieur. Malgré les
efforts du film et sa volonté de paraître honnête et réaliste, on
ne peut en sortir plus convaincu. Peut-être que la forme
fictionnelle d'un long métrage empêche toute prise de contact
réelle.
Le Rite se détache pourtant en apparence de pas mal de films sur l'exorcisme faits jusqu'ici dont quelques uns restent marquants. On pense à l'Exorciste bien sûr, de William Friedkin qui terrorisa les spectateurs lors de sa sortie en 1973. L'exorcisme d'Emily Rose fait aussi partie de ses classiques, d'autant plus que son histoire vraie n'a pas laissé insensible … les producteurs du Rite, qui sont également ceux du film de Scott Derrickson. Volontairement noir, Le Rite se propose d'aller au-delà des pratiques de l'exorcisme, au point de mettre en doute la frontière de la possession avec celle de la folie incontrôlée. C'est d'ailleurs le problème de ce jeune séminariste américain qui se retrouve avec le Père Lucas, son futur mentor. Celui-ci va lui montrer que les frontières sont très flous, mais que pour autant, des caractéristiques bien précises forgent la pensée et surtout la réception. Le jeune Novak continue pourtant de nier et d'émettre des doutes sur la possession d'une jeune femme enceinte qui sert de « cobaye-exemple » à l'explication de ces pratiques. Ce dogmatisme religieux qu'incarne le Père Lucas doit aussi par ailleurs nous convaincre de la véracité de ces pratiques et de l'existence d'une force démoniaque. Le jeu du suspense et de la tension marche sur une longue première partie, l'objet argumentaire devient vite lassant et surtout très prévisible. A l'image d'un Anthony Hopkins d'ailleurs qui apparaît lui-même comme un mentor en tant qu'acteur, face au novice et pas franchement convaincant Colin O'Donoghue (Michael Novak). Intrigant et attachant à la fois, il est amené à montrer un peu plus le revers démoniaque qui sommeille en lui, sans pour autant atteindre la force de frappe d'un Hannibal Lecter. Tout profane finit par rester distant avec le propos, face à cette volonté de noircir le tableau, une Rome froide et parfois lugubre, en contraste avec son côté jovial et ensoleillé, comme l'impression de revoir des scènes d'un Da Vinci Code, avec cette fois-ci le thème de l'exorcisme en pierre angulaire. La musique confirme quant à elle l'enfer bruyant qui tourne autour du film, alors que la photographie apparaît presque trop esthétisée, à l'image des décors.
Au final, le film ne répond pas à la question intéressante posée au début du film, et qui faisait de lui un objet original qui aurait pu se détacher de ce que l'on a pu voir jusqu'ici. Pas plus qu'un divertissement, à peine effrayant au début, c'est un scénario presque entier qui est mis en doute … plutôt qu'une croyance.
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