Cine-emotions

Vénus Noire: critique de la condition humaine ?

En présentant Vénus Noire, Abdellatif Kechiche veut continuer dans la lignée de ses excellents derniers films, et en même temps remue un passé colonial encore endolori.


Dans la première du scène du film qui s'ouvre tout en symbole au sein de l'Académie Royale de Médecine, l'anatomiste Georges Cuvier présente le moulage d'une femme Saartije Baartman montrant les caractéristiques exceptionnellement étonnante de son corps, de son sexe à son visage qu'il considère comme étant l'un des plus proche du singe. Entre remarques que l'on pourrait facilement taxer de « racisme scientifique », Cuvier apparaît pourtant comme un homme totalement crédible. On est ici dans l'image d'une médicine qui cherche à découvrir, mais qui surtout est à cette époque dans un âge d'or de la recherche française.

Cette sera à opposer à ce qui va suivre : la projection dans l'histoire de Saartije Baartman et son image d'icône des bas-fonds londoniens où elle est présentée en spectacle devant une foule à la choquée et enthousiasmée. On retrouve l'opposition entre le boss du spectacle (un chouette type venu de l'est et interprété par André Jacobs, aperçu dans Goodbye Bafana) qui met le traitement de la jeune femme sur le compte des besoins de l'industrie du spectacle (critique du « il faut choquer pour que la machine tourne), face aux bien-pensants qui pousse la justice à se mêler de l'affaire. Arrive alors le meilleur passage du film, celle du procès d'Hendrick Caezar face aux défendeurs des « droit de l'homme ». La qualité du scénario nous permet alors de voir se confronter deux plaidoyers tous deux très crédibles et implacables ! Comble de l'ironie quand on connait aujourd'hui l'histoire, et dans ce monde qui utilise le droit de l'homme comme un fondement du bien commun.


Cette Vénus Noire de Kechiche avait donc tout pour plaire. Le problème est que le film va s'éterniser dans un propos souvent très répétitif, et la seconde partie va offrir plus de mauvais côtés que de bons. Il suffit de prendre l'exemple de la surenchère du choquant pour comprendre que la Vénus Noire de Kechiche s'est malheureusement égarée quelque part. Peut-être aurait-on du faire la part belle à l'émotion qui reste plutôt linéaire et mal suggérée. A la place, on retrouve une Saartije Baartman traité comme une putain, qui finit d'ailleurs par l'être, emmené de force par un Olivier Gourmet, presque envoûtant dans sa façon de faire. On ressort de la salle relativement choqué, touché certes par l'histoire de Saartije Baartman, mais pas par le film.

Chez Abdellatif Kechiche, il était devenu une mode que de révéler au grand public le premier rôle. On souvient de l'Esquive où le jeune réalisateur révèle la rebelle Sara Forestier qui décroche alors le César du meilleur espoir féminin. Elle va alors évoluer chez les meilleurs, de Blier à Lelouch en passant par Resnais. Ne surtout pas oublier alors La graine et le mulet, autre grand film notable d'Abdellatif Kechiche qui révèle alors Hafsia Herzi qui décrochera successivement le Prix Marcello Mastroianni de la 64ème Mostra de Venise en 2007, et le César du Meilleur espoir féminin en 2008. On imagine que jamais deux sans trois, Yahima Torres qui endosse l'ignoble et indigne rôle (et assurément très difficile à concocter), pourrait bien rafler une récompense, ce qui serait entre nous un juste retour des choses.

Vénus Noire montre donc toute la complexité de l'être humain dans sa façon d'entrevoir l'autre comme étant d'une race différente. A la fois critique et observateur, Kechiche montre sans réellement prendre de parti, pour finalement finir dans la surenchère et la répétition, manquant d'offrir de l'émotion forte à son spectateur. Cela montre aussi toute la difficulté de faire un film crédible et passionnant sur toute sa longueur...

NOTE : 12 / 20



Bande Annonce HD VENUS NOIRE
envoyé par MK2diffusion. - Court métrage, documentaire et bande annonce.


07/11/2010
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