Cine-emotions

Un homme qui crie, un drame de coeur.

Prix du jury à Cannes, Un homme qui crie du réalisateur Mahamat-Saleh Haroun a surpris et ému.

 

L'histoire n'est pas universelle, bien qu'elle en ait l'air. Il s'agit de celle d'Adam, un maître-nageur, approchant la soixantaine, qui gagne un salaire relativement honorable en travaillant pour un hôtel de luxe. En pleine guerre civile, son fils lui prend malgré sa place près de la piscine, le rétrogradant au rôle garde-barrière. Malgré l'amour qu'il porte à son fils à qui il a tout appris, il commet l'irréparable : il troque son fils pour l'effort de guerre, et le laisse partir au front.

Mahamat-Saleh Haroun (Bye bye Africa, Darratt) est un cinéaste qui pourrait ouvrir derrière lui un sillage pour les réalisateurs africains encore peu connu à l'Occident. Pourtant, on connaît par exemple la qualité du cinéma nigérian qui produit presque autant de films que le Bollywood ! Quinze ans après la dernière nomination d'un film africain, Un homme qui crie va même figurer au Palmarès final en remportant un Prix du jury. Après le visionnage de ce film, il est incontestable que ce prix est entièrement mérité (si ce n'est pas plus). 


Un homme qui crie évoque avec une justesse sensible et touchante deux sujets bien distincts. Le premier est un film rouge puisqu'il s'agit de la guerre civile qui frappe toujours le Tchad et plonge le pays dans le chaos. Ce conflit sert de peinture au film, symbole de la violence plutôt suggéré, aussi bien par les bruits (les communiqués de radio, ressemblant fortement à une propagande visant le bourrage de crâne qui mentirait à son peuple) que par les faits (le père qui cède son fils pour l'effort de guerre). Puis le deuxième sujet est celui de la relation entre le père et son fils. La première scène où le gamin (Abdel) bat son père (Adam) à l'apnée est un symbole de l'échec de ce père qui va se voir supplanté par ce dernier pour le poste de maître-nageur, celui qu'il a toujours réussi à garder.

Mahamat-Saleh Haroun réussit à filmer tout cela avec un réalisme criant, mais surtout avec une intelligence presque hallucinante. On ne pourrait tout évoquer, mais il suffit par exemple de comprendre les plans de caméra sur le père, ses silences qui en disent long sur la situation. Il filme une violence plutôt silencieuse, intérieure, qui ne mène pas forcément à la guerre à commencer par la négation des corps (un habit blanc du maître-nageur, sur un corps noir). Comprenons qu'à l'issue du film, il faut bien admettre que la pire des violences est bien celle dont l'homme ne peut rien contre, elle est dévastatrice, silencieuse et invisible. L'émotion vient à la fois de la caméra, mais aussi des acteurs : si Diouc Koma incarne ce fils avec satisfaction, la prestation ahurissante est à mettre au crédit de Youssouf Djaoro, incarnant un père émouvant, et qui n'aurait pas volé son prix d'interprétation à Cannes.

Un homme qui crie est donc le coup de cœur du moment, un drame sensible et touchant, parfaitement mené par la caméra de Mahamat-Saleh Haroun et par la prestation toute en émotion de Youssouf Djaoro. Une leçon de cœur que l'on n'est pas prêt d'oublier.

NOTE : 16.5 / 20



UN HOMME QUI CRIE : BANDE-ANNONCE VOST
envoyé par baryla. - Les dernières bandes annonces en ligne.


29/09/2010
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