Cine-emotions

Tête de Turc, un thriller coup de poing.

Habitué à des films plus simplistes, Pascal Elbé passe derrière la caméra pour raconter une histoire coup de poing, s'attaquant à l'ordre moral et politique.

 

 

La situation est plutôt simple (ce qui facilite l'approche par le spectateur). Bora est un jeune ado de 14 ans, qui voit sa vie basculer lorsqu'il participe à un caillassage sans nom avec sa bande d'une voiture où se trouve un médecin, et qui poussé par la fièvre collective et une réflexion totalement absente, lance un cocktail molotov. Ce même jeune homme commençant à se rendre compte de son geste, décide d'aller extirper le médecin, qui va se retrouver entre la vie et la mort. S'engage alors un véritable combat de conscience et de moral.

 

Le film commence par une scène choc, assez longue, mais qui témoigne du ton que le réalisateur veut donner au film. Il s'attaque à la fois à l'ordre moral (ce qui est bon ou pas) et l'ordre politique (arrestations, contrôle de papiers abusifs etc...). Sauf que cette scène choc sera la seule dans ce film à réellement donner une ambiance gênante. Alors qu'une femme est arrêtée par des policiers (visiblement pour de la drogue), ce sont les jeunes qui commencent à caillasser ces hommes avant d'être dispersé. Mais le mal est fait, et la suite n'est qu'un déchaînement de violence dont on en connaît quelques réalités dans les banlieues. La scène est un exemple. Dans ce film, Pascal Elbé ne veut pas jouer sur les clichés, d'ailleurs il n'accuse personne mais s'engage en dénonçant les problèmes de cités, l'autorité policière et l'intégration parmi les sujets les plus brûlants.

 

Pour ce thriller, on retrouve Roschdy Zem (Atom, le frère de Simon) qui tente tout pour retrouver l'auteur de l'incendie, et ainsi aider son frère Simon (Pascal Elbé, sobre et efficace), en même temps qu'il continue à faire face à sa culpabilité du passé. En parallèle, Bora (Samir Makhlouf, belle révélation) se retrouve face à sa conscience, sous la pression de sa mère (magnifiquement bien interprétée par Ronit Elkabetz) qui rêve de s'intégrer, et en même sous la culpabilité (d'autres jeunes payent pour son acte, il doit faire face à la violence des jeunes de sa cité). Enfin, un homme veuf (joué par Simon Abkarian) qui le soir de l'accident attendait les urgences (et donc ce fameux médecin) pour sauver sa femme agonisante, se retrouve rongé par la tristesse face à un désir de vengeance.

 

Le film est intelligent, même s'il pourrait déranger, cela ne fait sûrement pas de mal de se poser dans le sujet brûlant des cités. Quel symbole (ou paradoxe) quand un turc sauve un arménien, surtout quand on connaît l'histoire des relations entre ces deux pays. Le film veut opposer l'intégration (à l'image d'Atom le flic) face au conservatisme buté de certains jeunes (qui ne voient aucune chances de sortir de cet enfer). Même sociologiquement le film semble bon, réfléchissant à la fois sur les notions de groupes, que sur des questions de rejets. Le défaut principal du film serait à penser trop angélique, en touchant du doigt la nécessité de communiquer, d'aider ces jeunes. Pascal Elbé pense à l'homme sans réellement donner de leçon, et le final assez étonnant et rapide en est le témoin.

 

Le sujet choisi n'est pas hasard pour le réalisateur qui nous offre ici son premier film: « Mama Galledou, passagère d'un bus, a été brûlée vive par des jeunes qui n'avaient pas la moindre conscience des conséquences de leurs actes ». Le réalisateur s'est également fortement documenté sur les cités, les relations avec les autorités locales. En profondeur, il prend le cas de ce jeune adolescent (14 ans tout de même) pour alerter son spectateur et faire une invitation au débat: comment peut-on en arriver à là ? Que devrait faire ce jeune ? Quelle conscience de l'acte ? Quel avenir pour ce type de jeunes ? Une multitude de questions proposées par le film, sans réellement y répondre en profondeur. 1H25 pour cela, c'est très léger.

 

Pascal Elbé réalise un premier film musclé et efficace, où il touche du doigt des questions brûlantes, sans totalement y répondre, laissant le spectateur sur sa faim. On aurait presque préféré un film plus engagé encore, au profit de l'émotion.

 

NOTE : 13 / 20

 


TÊTE DE TURC - BANDE-ANNONCE HD - de Pascal Elbé
envoyé par baryla. - Les dernières bandes annonces en ligne.


31/03/2010
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