Cine-emotions

Safy Nebbou se lance dans la vérité littéraire en se penchant sur le cas d'Auguste Maquet, le miroir du célèbre écrivain Alexandre Dumas.

Alors qu'Alexandre Dumas et Auguste Maquet, son nègre littéraire, sont au sommet de leur collaboration, Maquet décide de se faire passer pour Dumas afin de séduire Charlotte, une admiratrice de l'illustre écrivain.
Entre les deux hommes, l'affrontement est inévitable. Dans Paris, la Révolution de 1848 se prépare...

Ce sont deux sentiments qui ressortent du film : d'un côté, celui qui me fait dire que le cinéma français est un spécialiste pour aborder l'histoire et la littérature. Et de l'autre, L'Autre Dumas est un film qui laisse sur sa faim, comme si quelque chose manquait. Ce qui se remarque directement après le film, c'est que certaines scènes du long métrage (pour pas dire tout haut la bande annonce) résument le film. Le reste est ennui, longueurs de scènes, belle tirades et la sensation d'un scénario qui s'embourbe. On soulignera tout de même ce scénario rocambolesque qui arrive par moments à montrer Maquet dans ses sentiments intérieurs, et à dévaloriser un Dumas qui passe pour un libertin insatiable, incapable d'aligner une phrase correcte sans son miroir littéraire. Un homme sans talent quoi. Sauf que le film qui semble se focaliser sur le point de vue « Maquet, le véritable Dumas » semble oublier qu'Alexandre Dumas fut aussi un écrivain de renom avant 1844 (et l'arrivée de Maquet et de nègres qui ont aidé Dumas dans sa tâche) et notamment à la Comédie Française.

Le film veut se pencher sur Maquet, celui qui en 1858 lors d'un procès va revendiquer l'écriture d'œuvres comme Les Trois Mousquetaires, Le Comte de Monte Cristo, La Reine Margot, Le Vicomte de Bragelonne (le fameux roman que l'on retrouve en fil rouge du film). Auguste Maquet collabora avec Dumas de 1844 à 1851, sans que personne ne sache réellement qui il est, car le grand public ne connaît que la signature d'Alexandre Dumas. Et même aujourd'hui, voir à l'écran un film qui essaye de vous faire avaler que Dumas n'y est pour pas grand chose dans ces succès littéraires, c'est quand même un peu osé. Heureusement, le film se rattrape par une pirouette qui tend à laisser le spectateur quelque peu dubitatif sur le rôle de Maquet. Enfin, la scène finale, aussi magistrale soit-elle, laisse parfaitement entendre que Maquet est le véritable Dumas. Le film se dote de belles réflexions, aussi bien sur l'amour et le sexe, que sur la notion de révolution, mais l'ensemble reste très fragile, tellement le sujet était bon.

Il semble que public ait vu un Gérard Depardieu bien plus à l'aise dans ce genre de rôle historique. Sa façon de jouer ressemble à un jeu théâtral loin d'assurer de la crédibilité. Il est loin d'être le Dumas de l'imaginaire. Le réalisateur oublie de réellement préciser l'activité politique de l'écrivain. Sa vision de la révolution à l'écran est réellement minime, alors qu'il est clair que la révolution de 1848 va changer la donne. Après son échec aux élections, il soutient Cavaignac face à Bonaparte. Et quant à Maquet, il apparaît comme une girouette tellement sensible aux sentiments, capable de passer du royalisme pur au républicain. Le film ne dit pas non plus que c'est la justice (en payant gentiment Maquet) qui a fait qu'aujourd'hui, Dumas est connu pour Les Trois Mousquetaires, et non Maquet. L'Autre Dumas se rattrape au moins sur une réalisation plutôt satisfaisante, des décors très bons et un jeu d'acteurs assez convaincant. On retiendra notamment la prestation impressionnante de Benoît Poelvoorde, tout en émotion et en grâce.

Une réalisation et une façon de traiter le sujet trop théâtrale, voir trop laxiste, qui plonge le spectateur dans un ennui profond, tant le film pourrait se résumer à quelques scènes qu'une simple bande annonce a pu nous montrer. Un point de vue plus que discutable de la part de Safy Nebbou. 

NOTE : 9.5/20