Cine-emotions

La Rafle, ou le devoir de Mémoire obligatoire

La rafle du Vel' d'Hiv n'avait jamais été évoqué au cinéma auparavant. Rose Bosch permet en 2010 de rendre hommage à ces juifs oubliés et de faire la lumière sur l'horreur.

 


Les manuels d'Histoire en parlent, mais bien trop peu probablement. On évoque plus largement la Shoah et les camps d'extermination, les fours crématoires. Mais on oublie le reste. On évoque alors rarement, vaguement même, le Vel' d'Hiv et ses 13 000 juifs déportés, ou encore le massacre d'Oradour-sur-Glane un 10 juin 1944 (et ses 642 victimes). Et on passe encore bien d'autres évènements dans ce genre. La Mémoire n'est pas que la Shoah. Au cinéma, c'est la même chanson, tous ont traité avec plus ou moins de réussite de ce génocide organisé. Récemment Liberté (de Tony Gatlif) s'est penché sur les tsiganes (eux aussi considérés comme des « Indésirables »). Aujourd'hui, c'est Rose Bosch qui se penche sur le Vel' d'Hiv, un événement tragique et qui devrait être connu de tous… pour la Mémoire.

C'est donc un matin du 16 juillet 1942 que 13 000 juifs parisiens furent raflés par la police française sur ordre de Pierre Laval, René Bousquet (secrétaire général de la Police française) et celui que l'on voit trop peu, Jean Leguay (délégué de la Police de Vichy en zone occupée). Des rafles comme celle du Vel' d'Hiv, il n'y en aura pas d'autres d'une aussi grande ampleur. Lors de la conférence de Wannsee (janvier 1942), Eichmann avait demandé aux pays occupés de livrer les juifs et de les envoyer par convois à Auschwitz. Pour Paris, les nazis visaient 24 000 juifs, pour finir à 13 000 au final. 10 000 autres vont réussir à éviter la mort, grâce au courage des parisiens qui les ont cachés. Et Rose Bosch n'oublie pas de leur rendre aussi hommage. Ce film présente un point fort plutôt intéressant : il ne diabolise pas, il montre. En effet, on ne remarque aucune tendance à diaboliser la police française ou Pétain, comme on ne cherche pas non plus à jouer trop mièvre chez les déportés. Le spectateur se fixe sa propre opinion, Bosch tourne pour la Mémoire.

 


Pour ce film, elle choisit de faire tourner Jean Reno, toujours aussi juste dans ses prestations, Gad Elmaleh, qui confirme qu'il est meilleur pour jouer le dramatique que la comédie (cf. Coco), et enfin Mélanie Laurent (habitué à la jouer héroïne française depuis Inglourious Basterds). Elle choisit aussi de s'orienter sur les enfants, véritables fil rouge du film. Ce sont aussi eux les oubliés du Vel' d'Hiv, car aucun ne reviendra. Sauf un, qui a réussit à s'enfuire. Joseph, 11 ans, qui n'est autre que Joseph Weismann, 80 ans aujourd'hui, qui est le seul à avoir vécu le Vel' d'Hiv. C'est une occasion en or pour rendre hommage et passé cette tragédie de la Mémoire à l'Histoire, car bientôt il n'y aura plus personne pour dire « J'y étais ». C'est donc à travers les yeux de cet enfant que le film va dérouler ses pires violences, sans aller trop loin dans l'exagération, il reste honnête, drôle pour ne pas être trop sombre, poignant sans trop en faire. Car si la bande annonce prévient d'un torrent d'émotion, La Rafle ne s'affirme pas comme un film qui va faire pleurer. Il ne laisse pas insensible, c'est une chose certaine, mais il est sensiblement là pour montrer des choses et donner au spectateur l'occasion de se souvenir.

Son seul point négatif est plutôt de l'ordre technique : plus qu'un film, La Rafle pourrait très bien trouver sa place dans le format téléfilm. Il n'a rien à avoir avec La Liste de Schindler ou Le Pianiste. Il reste plutôt naturel (hormis la scène de panorama sur le Vélodrome d'hiver). On pourra aussi lui reprocher peut-être trop de larmes qui paraissent de trop, mais l'intérêt n'est pas là, et ce ne sont pas les larmes ou les cris déchirants qui sont les mieux appropriés. L'émotion prend vraiment tout son sens dans les scènes de fin, et pour pouvoir les apprécier à leurs justes valeurs, il faut aller voir La Rafle, simplement pour un devoir de Mémoire.

Rose Bosch et son film rendent un hommage vibrant et naturel aux oubliés du Vel' d'Hiv, et notamment ses enfants à l'image de Joseph Weismann. Sans trop en faire, La Rafle réussit à toucher son spectateur qui ne peut pas rester de marbre face à ce genre de travail pour la Mémoire.

 

NOTE: 14.5 / 20

 

 


LA RAFLE - BANDE-ANNONCE HD - Jean Reno, Gad Elmaleh...
envoyé par baryla. - Court métrage, documentaire et bande annonce.


10/03/2010
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